A partir de quelques articles publiés recemment nous remontons à la surface ou nous ouvrons nos yeux sur un traitement physique non pharmacologique de la douleur et de la fonction dans l’arthrose.

La moxibustion

La moxibustion est une technique de stimulation des points d’acupuncture par la chaleur. Le nom donné à ce traitement provient de l’utilisation de moxas. Ce sont des cônes ou des cylindres formés à partir de poudre d’armoise (le mugwort anglo-saxon) séchée et broyée utilisés en médecine chinoise et japonaise depuis des millénaires.  Cette plante est stimulante, se consume très lentement et produit une chaleur suffisante sans bruler la peau. Elle est sensée en médecine chinoise extraire le Yin et le Yang, qui sont l’équilibre entre le corps physique et son entourage. On la trouve facilement en Europe et en Asie au bord des routes ou sur les terrains incultures C’est l’Herbe de St Jean  qui se ramasse en juin que l’on fait sécher pendant de nombreuses années puis que l’on broie pour en faire de l’étoupe.

Les moxas font probablement suite à l’utilisation encore plus ancienne connue de poinçons de pierre puis de cuivre. Ils ont été largement mis à la mode en Europe au XIX° siècle et utilisés comme les pointes de feu des cautères. Le moxa était le remède à tous les maux dans les écrits de Balzac, il soignait même les conjugopathies. Au XX° siècle ce traitement est  retombé dans l’oubli persistant cependant en médicine traditionnelle chinoise avec ou sans association à l’acupuncture classique.

Dans la méthode directe Ils sont donc allumés à leur sommet  et placés sur la peau au niveau des points traditionnels d’acupuncture. Ils vont progressivement transmettre de la chaleur à la peau du fait de la combustion lente de l’armoise. Ils sont ôtés dès que la sensation de chaleur est trop intense ou que la peau devient rosée autour du foyer de combustion mais avant la brûlure puis il est remplacé une ou deux fois à chaque séance.

On peut trouver des moxas en cônes ou en cylindre allant en taille du grain de blé à au noyau d’abricot. Ils sont placés directement sur la peau et souvent tenus par une pellicule adhésive ou séparé par une lamelle de végétal comme le gingembre par exemple.

Dans la méthode indirecte, on utilise des bâtonnets consistant en tubes de carton ou de papier rempli de poudre d’armoise sèche plus ou moins associée à d’autres plantes  médicinales. Les tubes sont enflammés pour démarrer une combustion sans flamme puis ils sont approchés à quelques centimètres des zones correspondant aux points d’acupuncture  pour la pathologie à traiter. Le praticien laisse ainsi le tube jusqu’à ce que la peau du patient devienne rougeâtre et que la personne ressente une agréable chaleur.  Il retire alors le tube puis le remet au bout de quelques secondes et ainsi de suite en évitant là aussi d’arriver au stade de brulure de la peau.

On peut enfin utiliser des aiguilles d’acupuncture au bout desquelles on fixe une boule d’armoise que l’on enflamme. la chaleur dégagée va se transmettre au point de piqûre.

La moxibustion permet ainsi de prévenir ou de traiter notamment des problèmes comme les douleurs rhumatismales, articulaires et musculaires,

C’est ainsi qu’une équipe chinoise (1) de la province de Jiangsu en Chine a réalisé et publié une étude de la moxibustion dans la gonarthrose. Nous vous en communiquons l’abstract traduit. 

Abstract

But de l’étude

Etudier l’efficacité de la moxibustion sur la douleur, la raideur et les troubles moteurs déperminés par l’arthrose du genou  chez des patients qui en sont atteints. Evaluer l’innocuité de ce traitement.

Matériel et methode

Cinquante-neuf cas d’arthrose du genou ont été répartis aléatoirement dans un groupe de moxibustion (31 cas) avec cône moxa actif  ou dans un groupe de moxibustion placebo avec sticker moxa placébo (28 cas). Les dispositifs ont été appliqués sur les mêmes trois points : Neixiyan (EX-LE 4), Dubi (ST 35) et  Ashi séparément. Le traitement a été administré 3 fois par semaine, en continu pendant 6 semaines. Une  visite de suivi a été effectuée ensuite à la 12° semaine après la fin du traitement. Le WOMAC) et le temps nécessaire pour marcher sur  46 mètres à la vitesse la plus rapide ont constitué les critères objectifs de l’étude pour évaluer les améliorations potentielles. Un détecteur thermique numérique UT-325 a servi à enregistrer le changement de température aux points douloureux du genou les  plus apparents avant et après traitement.

Résultats

Dans le groupe de la moxibustion avec moxa actif, les scores de WOMAC ont diminué de façon significative dès la 3° semaine de traitement avec confirmation à la 6° puis à la 12° semaine lors de la visite de suivi (respectivement P < 0,05, P < 0,01, P <0,001). Pour le groupe placebo, seule la raideur était améliorée à la 12° semaine lors de la visite de suivi (p<0.05). Après 6 semaines  de traitement puis à la 12° semaine, douleur, raideur et mobilité ont été statistiquement améliorées dans le groupe moxa actif  par rapport au groupe placébo (P < 0,01, P <0,05). De la même manière le temps de marche de 46 mètres à la vitesse la plus rapide a été diminué dans le groupe actif  par rapport au temps basal alors qu’il n’y a eu aucune amélioration après traitement dans le groupe placebo (P > 0,05 >).Cependant la comparaison entre les 2 groupes n’a pas mis en évidence de différence significative pour ce critère  (P > 0,05). Après traitement actif, la température au point de traitement était de 49.81 +/-3,10 degrés C  alors qu’était de 40,98 +/-1,67 degrés C dans le groupe placébo. La température locale de la peau augmentait  de façon statistiquement significative dans les 2 groupes (P < 0,001, P < 0,01), mais  cette augmentation de température était  beaucoup plus nette (P< 0,001) pour le groupe moxa actif.

Conclusion

Les auteurs concluent que la moxibustion est un traitement sûr et efficace qui améliore de façon statistiquement significative les symptômes cliniques tels que douleur, raideur et mobilité des patients souffrant d’arthrose du genou.

Au final

Cette étude ne comporte pas un grand nombre de cas dans chaque groupe et les dispositifs utilisés sont différents, ce qui limite la portée des résultats obtenus. Cependant cette méthode thérapeutique semble efficace et sans inconvénients quand appliquée par des praticiens aguerris. Ils ne sont malheureusement pas légion en France ce qui limite la portée de l’information. Il faut préciser que ce n’est surement pas un traitement à appliquer soit même et qu’il doit rester entre les mains des médecins. On signale enfin qu’une étude coréenne (2) similaire a été entreprise récemment. Nous vous en communiquerons les résultats dès qu’elle paraitra.

Bibliographie

(1) Ren XM, Cao JJ, Shen XY, Wang LZ, Zhao L, Wu F, Zhang HM. Knee osteoarthritis treated with moxibustion: a randomized controlled trial. Zhongguo Zhen Jiu. 2011 Dec;31(12):1057-61.

(2) Lee S, Kim KH, Kim TH, Kim JE, Kim JH, Kang JW, Kang KW, Jung SY, Kim AR, Park HJ, Shin MS, Hong KE, Song HS, Choi JB, Kim HJ, Choi SM. Moxibustion for treating knee osteoarthritis: study protocol of a multicentre randomised controlled trial. BMC Complement Altern Med. 2013 Mar 13;13:59