La « chambre à air » est en période de gonflage! Courage, mesdames!

La relation entre le surpoids et l’intensité de la douleur est établie dans la gonarthrose.

On sait que l’arthrose du genou et son caractère +/- évolutif sont en rapport notamment avec le surpoids et que ses symptômes sont exacerbés par cette situation surtout lorsqu’elle devient pathologique au cours de l’obésité. On sait aussi qu’il est difficile de proposer des exercices physiques, une des conditions physiques pour un amaigrissement imposé, puisque ceux-ci sont vite limités par les douleurs qu’ils apportent. C’est le cas de la marche. Comment donc concilier ces exigences ?

Avant de proposer à la lecture une étude qui apporte une solution intéressante à cette question, nous vous proposons de revenir vers quelques décennies plus tôt.

Cliquer sur l’image pour retrouver la vidéo sur Youtube 

 Dès que l’on s’est rendu compte au cours de vols spatiaux successifs que les astronautes en apesanteur se décalcifiaient malgré une activité de plus en plus possible et imposée, on a fabriqué pour eux dans les années 1990 avec la NASA des chambre-machines reproduisant une force d’attraction  réglable en pourcentage de pression et comparable à celle de la  gravité, utilisables en exercices quotidiens sous forme de tapis de course.

D’autres techniciens ont aussitôt trouvé une utilisation différente de cette machine qui pouvait tout au contraire permettre de réaliser des mouvements avec une diminution progressive et programmable de la pesanteur rendant, comme dans l’eau ou grâce à un harnais, les mouvements plus faciles. Ils ont ainsi créé en 2006, chez  AlterG®, un tapis de course «Anti-Gravity Treadmill» destiné au départ à la rééducation des grands blessés des membres inférieurs et à l’entrainement des grands sportifs. L’individu est placé dans une chambre d’air qui le ceinture au niveau du bassin et le soulève doucement par augmentation de pression réglable. Ainsi on obtient un allègement relatif du poids du corps diminuant de ce fait la pression subie par les articulations des membres inférieurs. Cet effet peut passer ainsi  de 100%, le poids normal à 20% de celui-ci par réglage progressif de la pression dans la chambre à air . La vidéo ci-jointe que vous pouvez ouvrir en cliquant sur l’image vous montre comment on utilise cet appareil.

L’ETUDE

Cette technologie dite d’allègement du poids du corps à pression positive (Lower Body Positive Pressure: LBPP) a été utilisée dans une étude réalisée par des chercheurs canadiens (*) sur des sujets obèses pour mesurer l’impact du poids sur le degré de la douleur ressentie au cours de la marche chez des patients atteints de gonarthrose. Ils ont donc recruté 22 sujets en surpoids (IMC>25 kg/m2) avec arthrose du genou symptomatique confirmée radiologiquement (stade II et III de K et L)   qu’ils ont inclus dans un programme d’activité contrôlée comportant des séances de marche sur tapis en mode LBPP anti-gravité et en mode contre pesanteur (full weight bearing FWB). Chaque patient inclus a été randomisé pour recevoir en mode aveugle ces deux types de séances à une semaine d’intervalle. Celles-ci duraient 20 minutes avec marche sur le tapis qui reproduisait une vitesse de 5 kilomètres/heure. Les patients notaient leur douleur toutes les 5 minutes grâce à une EVA. La pression dans la chambre à air était alors adaptée et notée au même moment pour minimiser la douleur.  De même les participants remplissaient avant chaque séance de marche et un semaine après la fin des 2 sessions de marche un questionnaire de type KOOS, qui est un index algo fonctionnel pour le genou (Knee Injury and Osteoarthritis Outcome Score) portant sur la douleur et les autres symptômes, le retentissement sur la vie quotidienne et le sport, enfin la qualité de vie.

tableau 1

Voici les données démographiques de la population incluse résumées dans le tableau 1. On note que ce sont des sujets relativement jeunes mais avec un surpoids important.

tableau 2

Le tableau 2 montre le pourcentage d’allègement du poids du corps necessaire pour obtenir la douleur la moins forte possible au cours des exercices de marche en LBPP

tableau 3

Le tableau 3 montre les variations de la douleur mesurée par EVA tout au long des séances à chque intervalle de 5 minutes. Il existe une différence significative entre les séances LBPP et FWB au profit des premières (22,6 +/-21,5 contre 30,0 +/- 20,1 : p<0,05)

La figure 1 montre les variations de la douleur en fonction du temps de marche et selon le type de l’exercice éffectué. On voit que les exercices en LBPP sont significativement moins douloureux et que l’amplititude de l’augmentation en fonction du temps écoulé est bien moindre malgré une douleur initiale identique dans les deux groupes en début d’exercice

figure 1

Le tableau 4 montre qu’il n’y a aucun changement significatif dans le score de KOOS quelles que soient les périodes analysées ; avant sessions de marche 1 ou 2 ou  celle 1 semaine après les exercices.

RESULTATS

tableau 4

Une diminution moyenne par LBPP de 12,4 % du poids corporel apporte aux patients un soulagement significatif de la douleur au cours de la marche et empêche une exacerbation de la douleur des genoux arthrosiques au cours de l’exercice. Il est à noter que le score-index composite KOOS n’a pas été modifié significativement pendant la durée de l’étude.

CONCLUSIONS DES AUTEURS

Ils suggèrent que cette technologie LBPP soit utilisée en toute sécurité et efficacement pour simuler la perte de poids et réduire la gonalgie induite par les exercices de marche chez les patients en surpoids  atteints de gonarthrose symptomatique. Ces résultats pourraient, selon eux avoir des implications importantes lors de l’élaboration de futures stratégies pour le traitement des patients ayant une arthrose du genou à risque.

NOTRE AVIS

Cette étude est intéressante car:

  • elle met en évidence de façon certaine la relation entre la prise de poids et l’intensité de la douleur au cours de la gonarthrose. Cela est suggéré dans toutes les études. Les auteurs ont établi qu’une perte de poids de 12% était le seuil à partir duquel un patient voyait sa douleur diminuer significativement au cours de la marche. 
  • elle apporte de façon irréfutable au sujet obèse un argument intéressant pour l’inciter à entamer une cure d’amaigrissement.
  • elle permet de proposer à des sujets qui souffrent à la marche de réaliser des exercices devenus indolores sous technologie LBPP. C’est donc un moyen d’aider le patient à maigrir en pratiquant de façon indolore un exercice comme la marche qu’ils ne peuvent pas envisager dans la vie courante. 


 Bibliographie

*Takacs J, Anderson JE, Leiter JR, Macdonald PB, Peeler JD. Lower body positive pressure: an emerging technology in the battle against knee osteoarthritis? Clin Interv Aging. 2013;8:983-91.
Department of Human Anatomy and Cell Science, University of Manitoba, Winnipeg, Manitoba, Canada.