La viscosupplémentation de la hanche n’est pas une alternative à la chirurgie dans la coxarthose (*) 

Les résultats de la viscosupplémentation dans l’arthrose de hanche ne baignent pas dans un consensus positif comme le sont ceux du genou où l’efficacité du geste est reconnue par toutes les équipes qui ont traité le sujet. Une étude de P Richette avait conclu chez 83 patients atteints de coxarthrose à un résultat similaire à celui du placébo après une injection de ADANT. Deux autres études de T. Conrozier avaient montré des résultats significativement positifs, l’une pour Durolane et l’autre pour Synvisc. Nombre d’études comparables ont confirmé ces discordances.

La raison de cette absence d’homogénéité dans les résultats est comme d’habitude à rechercher dans le fait que les études n’ont pas le même le même design (randomisé contre placébo ou ouvert, nombre de patients, stade radiologique variable des lésions, durée de suivi, nombre d’injections, présentation différentes des produits avec les linéaires ou les réticulés, le poids moléculaire, le volume ou la concentration).

Parmi tous les facteurs d’échec reconnus de la viscosupplémentation, l’un peut être analysé assez simplement. Il s’agit du moment choisi pour réaliser le geste. On connait tous certains patients désireux de tout tenter sur le plan médical pour arriver à un état fonctionnel et algique acceptable: ils optent pour une injection d’acide hyaluronique quand celle-ci devient le dernier recours avant la chirurgie  compte tenu de l’état de l’échec de tous les traitements préalables. Un autre groupe peut être formé qui comporte des patients avec la même pathologie de hanche et recevant le produit au cours du traitement classique après échec ou intolérance des antalgiques ou AINS dans la continuité d’une prise en charge classique. Ce n’est donc pas le stade radiologique qui guide le tri.

Ainsi 137 patients tout venant, successifs, recrutés sur 6 mois et issus de la pratique courante reçoivent une injection dans la hanche du même viscosupplément : HANOX® M-XL (HappyCross®). Ils sont ensuite contactés par téléphone 3 à 4 mois après le geste pour recueillir grâce à un questionnaire standardisé les différentes réponses aux items suivants :

  • -âge, sexe,
  • -Consommation d’antalgiques et/ou AINS avant l’injection
  • -Pourcentage de réduction de ces médicaments après le geste
  • -type de geste : guidage radiologique ou échographique ou rien
  • -douleur actuelle sur une EVA en 10 points
  • -évaluation de l’efficacité, Satisfaction et tolérance sur une échelle en 4 points

La dernière question posée est la suivante :

Avant l’injection, aviez-vous décidé de vous faire opérer en cas d’échec de celle-ci ?

La réponse permettait donc de trier les patients en 2 groupes comme suggéré plus haut :

  • pas d’opération envisagée à court terme (groupe 1)
  • prothèse à poser après échec éventuel de la viscosupplémentation (groupe 2).

Les résultats de l’étude.

Ont été inclus 50 hommes pour 87 femmes, d’âge moyen 63,9 +/-10,5 ans, avec un recul moyen par rapport au geste de 11 semaines.Ce sont des patients qui dans 64% des cas consomment des antalgiques et/ ou antiinflammatoires s’averant donc insuffisants dans le contrôle de la doulezur et de la fonction.

Les injections ont été majoritairement réalisées sous fluoroscopie avec amplificateur de brillance pour 116 cas soit 84,6%, sous échographie dans 17 cas soit 12,4% et dans 4 cas sans ancun contrôle :3%

Le groupe 1 comportait 91 patients soit 66,5% du total. Le groupe 2 avait 46 sujets représentant 33,5 % de l’ensemble. On a remarqué dans ce dernier groupe une prépondérance masculine statistiquement significative (p=0.004) avec un plus grand nombre de patients a&yant recours aux antalgiques/AINS : 76% versus 57% (p=0.002)

En analysant l’ensemble des patients inclus on obtient pour la douleur, l’efficacité et la satisfaction les résultats suivants :

 Si l’on analyse uniquement le groupe 1 on obtient :

 Concernant le groupe 2 on a :

L’analyse de la tolérance se résume dans le diagramme suivant avec une bonne ou très bonne tolérance dans plus de 85% des cas sans différence entre les deux groupes analysés. Concernant la tolérance moyenne ou mauvaise elle était à rapporter à une augmentation de la douleur locale pendant une journée mais pouvant aller jusqu’à 1 semaine elle-même sans rapport avec le mode d’injection.

 L’analyse de ces résultats montre très clairement que les bons résultats d’une viscosupplémentation par l’acide hyaluronique ne vont pas se trouver lorsqu’elle est réalisée dans la période où la mise en place d’une prothèse se discute après le long chemin parcouru avec le traitement médical. On peut noter encore à cette période un nombre non négligeable d’environ 1 patient sur 7 pour lesquels la prothèse va être à nouveau repoussée. Le taux de satisfaction le plus élevé pour la viscosupplémentation provient bien sûr du groupe des coxarthroses qui suivent un traitement médical classique et qui, dans sa continuité, leur apporte toute satisfaction. C’est au cours de celui-ci que le geste est proposé puis accepté avec un effort financier volontaire qui plus est. Il n’y a pas de remboursement au moins pour le produit (prise en charge réservée au genou… pour quelques semaines encore ?). Le pourcentage de satisfait atteint dans ce groupe près des 2/3 des patients, ce qui rend indiscutable l’efficacité de ce traitement et le maintien de sa  place dans l’arsenal thérapeutique au cours de la coxarthrose.

L’auteur s’attarde finalement sur les échecs de la viscosupplémentation dont il faut rechercher l’origine :

  • dans le mécanisme d’action de l’acide hyaluronique : il ne peut en effet pas tout.
  • dans l’origine des douleurs sévères d’une coxarthrose avancée.

L’acide hyaluronique  intra-articulaire peut s’opposer à la production notamment de substances algogènes comme les prostaglandines E2 ou la bradykinine. Il limite la dégradation du cartilage en ayant un rôle de barrière contre les agressions tissulaires et cellulaires dont les produits issus de leur destruction sont générateurs d’une synovite inflammatoire qui entretient à son tour la perte tissulaire.

Dans une arthrose sévère et/ou avancée la douleur prend une tonalité multifocale avec sensibilisation, au-delà des simples nocicepteurs synoviaux décrits plus haut, des structures nerveuses supérieures : moelle, tronc cérébral et région thalamo-corticale. Cet emballement des voies de la douleur et de son centre est généralement conditionné par l’intensité importante sur une longue durée de l’état algique avec son retentissement sur la fonction. L’acide hyaluronique intra-articulaire à ce stade n’ plus aucun effet antalgique. Il en est d’ailleurs de même lorsque la composante douloureuse de l’arthrose est plus d’origine osseuse par hyperpression notamment sous-chondrale.

Conclusion.

Au terme de ce travail les auteurs concluent au bon effet de la viscosupplémentation avec  une seule ampoule de HANOX® M-XL dans plus d’un cas sur deux au cours du traitement de la coxarthrose Cette proportion atteint les deux tiers de patients satisfaits lorsque l’arthrose est cliniquement peu sévère tandis que chez ceux pour qui la prothèse se discute dans un contexte d’échec du traitement médical, un tel effet bénéfique n’est obtenu que dans moins de 5% des cas.

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Notre avis.

Oui, la viscosupplémentation n’est pas une alternative à la chirurgie dans la coxarthrose et elle doit intervenir généralement au cours d’un traitement médical bien conduit remplaçant les antalgiques et/ou antiinflammatoires peu efficaces ou mal tolérés voire contrindiqués. Elle a la même place que dans le traitement de la gonarthrose bien mené. Les études sur le genou suggèrent des résultats équivalents avec un taux de satisfaction identique et supérieur à 50%. Celui-ci pourrait donc être amélioré et avoisiner les 2/3 en appliquant les mêmes conditions  que dans la hanche et notamment: degré modéré  d’ évolution, absence de douleurs d’origine osseuse tel que celle présente au cours des poussées inflammatoires avec ou sans épanchement (il est parfois tardif dans son apparition), conditions techniques strictes pour une injection intra-articulaire certaine, choix du viscosupplément.

Les conditions de réalisation de l’étude avec des praticiens aguerris aux injections sous contrôle permettent ici d’optimiser les qualités intrinsèques d’un viscosupplément de 2° génération : HANOX® M-XL (M pour mannitol : il y est fortement dosé (3,5%) et XL pour une réticulation contrôlée). Nul doute que dans les mois et années à venir la viscosupplémentation prendra de plus en plus de place dans la stratégie thérapeutique pour la prise en charge de l’arthrose malgré une défiance très nouvelle  des autorités sanitaires envers  l’utilisation d’un  produit jugé récemment sans valeur thérapeutique  sur la base probable des conclusions  d’une seule étude suisse partielle et partiale (1) : c’est un « pot-pourri » de travaux tous aussi différents les uns que les autres qui aboutit pourtant  à montrer que l’acide hyaluronique a une action antalgique bien supérieure à celle du paracétamol

S’il s’agissait différemment  d’une frilosité financière (bien compréhensible en période de restrictions budgétaires) à vouloir rembourser un traitement sans efficacité prouvée après quelques années d’utilisation, l’ensemble de la profession médicale suivrait sans problème les décisions éventuelles de dé- ou non-remboursement.

Ce n’est pas le cas et tous les travaux récents, américains ou européens, sans aucun conflit d’intérêt sous-jacent quel qu’il soit, montrent que la viscosupplémentation induit des économies annuelles importantes dans la prise en charge de l’arthrose parce qu’elle est efficace et diminue par là même les risques d’accidents iatrogènes de plus en plus répandus avec l’usage des antalgiques et/ou antiinflammatoires chez des patients qui vieillissent  .

Dans un congrès où l’ensemble des acteurs manifestait leur préoccupation par rapport à un déremboursement de la totalité des composants constituant la classe thérapeutique des antiarthrosiques à action symptomatique lente  (chondroïtine, glucosamine, insaponiables du soja et avocat, diacéréine, acide hyaluronique) cette présentation orale avait le mérite de montrer une nouvelle fois qu’à l’opposé de chiffres froids édités par des épidémiologistes statisticiens loin de la réalité, un travail tiré de la vraie vie, celle qui intéresse le patient, apportait  des messages autrement positifs dans tous les sens du terme.

« Arthrose du genou : éviter l’acide hyaluronique intra-articulaire » avait titré en 2012 la revue « Prescrire » sur la seule lecture du travail incomplet de A. Rutjes (1) sans morts relatés (une chance !) mais avec des risques de cancer suggérés sans aucune preuve, etc.. Quand verrons-nous publiés dans ce journal les travaux de J. Mar(2), de T.R. Ray(3) ou de R.R. Bannuru (4) mais aussi de L.E. Miller (5) pour les plus récents avec bien d’autres encore sur ce sujet. Tous signalent le profil économique, sûr et sécurisant de l’acide hyaluronique associé à son efficacité. 

A-t-on idée du nombre de décès directement liés à la mise en place d’une prothèse de genou ou de hanche ? Une des dernières statistiques datant de 2012 et publiée par J. Caton(6) parlait de 0.33% de décès en rapport avec la mise en place de la prothèse de hanche . Il y a 226,4 prothèses de hanche pour 100.000 habitants en France. Le « parc » dépassait le million et 400.000 dans notre pays en 2010. On peut donc penser qu’il y a eu près de 5000 morts depuis la 1° prothèse posée en France il y a un peu plus de 40 ans et donc environ 100 par an. A-t-on vu un seul article sur le coût et la dangerosité de ce traitement ? Non et c’est heureux car il s’agit avec ses risques d’un  « miracle » thérapeutique du XX° siécle : personne ne le conteste.  Continuons à bien prescrire et bien injecter les acides hyaluroniques au cours de l’arthrose puisque la majorité des patients sont contents et réclament ce traitement.

Bibliographie

(*)T. Conrozier, M. Bossert, A. Lohse-Walliser , J.-C. Balblanc. La viscosupplémentation de la hanche n’est pas une alternative à la chirurgie dans la coxarthrose : résultats d’un suivi standardisé chez 137 patients. CHR de Belfort. Présentation orale. 26° Congrès national SFR Paris – décembre 2013. Rev Rhum 2013; 80 (Suppl): A61
1-Rutjes AW, Jüni P, da Costa BR, Trelle S, Nüesch E, Reichenbach S. Viscosupplementation for osteoarthritis of the knee: a systematic review and meta-analysis. Ann Intern Med. 2012 Aug 7;157(3):180-91. 
2-Mar J, Romero Jurado M, Arrospide A, Enrique Fidalgo A, Soler López B.Cost-analysis of viscosupplementation treatment with hyaluronic acid in candidate knee replacement patients with osteoarhritis. Rev Esp Cir Ortop Traumatol. 2013 Jan-Feb;57(1):6-14
3-Ray TR. Using viscosupplementation to treat knee osteoarthritis. Phys Sportsmed. 2013 Nov;41(4):16-24. doi: 10.3810/psm.2013.11.2032.
4-Bannuru RR, Vaysbrot EE, Sullivan MC, McAlindon TE. Relative efficacy of hyaluronic acid in comparison with NSAIDs for knee osteoarthritis: A systematic review and meta-analysis. Semin Arthritis Rheum. 2013 Oct 14.
5-Miller LE, Block JE. US-Approved Intra-Articular Hyaluronic Acid Injections are Safe and Effective in Patients with Knee Osteoarthritis: Systematic Review and Meta-Analysis of Randomized, Saline-Controlled Trials. Clin Med Insights Arthritis Musculoskelet Disord. 2013 Sep 1;6:57-63
6- J Caton, P Papin. Typologie et épidémiologie des prothèses totales de hanche en France.   e-mémoires de l’Académie Nationale de Chirurgie, 2012, 11 (2) : 001-007.


 

 

 

 

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