Pendant que de nombreux spécialistes de l’arthrose penchent de plus en plus pour une théorie etiopathogénique générale à l’origine de la maladie arthrosique débouchant sur la recherche de traitements généraux (anti cytokines, strontium…), d’autres équipes continuent à investir dans la recherche à travers des gestes thérapeutiques locaux pour traiter une affection qui ne pourrait être, aussi, qu’une somme de maladies locales.
On connait l’effet bénéfique des injections répétées de petites doses de corticoïdes (inhibiteurs notamment des collagénases) dans les articulations. J.P. Pelletier de Montréal (1) avait réalisé un travail très intéressant sur cette approche thérapeutique de l’arthrose probablement mise de côté en raison de l’allergie « populaire » à la cortisone. On connait aussi celui de l’aprotinine (inhibiteur des protéases) appliqué localement dans les tendinopathies puis dans la discarthrose (2) mais aussi aux genoux et hanches arthrosiques jusqu’à ce que l’anti enzyme disparaisse des « rayons » de la pharmacopée en raison probablement de son peu de rendement financier et surtout de son remplacement par des traitements plus adaptés au cours des pancréatites où il puisait son indication. Ces produits ont marqué l‘époque de la théorie pathogénique enzymatique de l’arthrose qui a tout de même fait faire un bond considérable dans l’approche de la connaissance de cette affection. En sont sortis d’ailleurs les anti arthrosiques à action symptomatique lente dont beaucoup ont ensuite été associés à une action anti- ou pro-cytokine (IL1, TGFβ..) propre pour leur faire négocier le nouveau virage pris par la recherche dans cette affection.
Il n’en reste pas moins que des travaux récents ont permis de remettre à jour l’utilité des traitements locaux dans le traitement de l’arthrose.
L’étude Biovisco
L’étude « Biovisco » initiée par le docteur Thierry Conrozier, spécialiste incontesté de l’arthrose, vient à nouveau de remettre au premier plan les effets bénéfiques de l’acide hyaluronique injecté (AH) en intra articulaire dans la gonarthrose. La publication tirée de ce travail multicentrique français (3) qui avait reçu l’aval de la Société Française de Rhumatologie et du pôle recherche des Hospices Civils de Lyon vient ainsi à point. On a enfin une première preuve d’efficacité pharmacologique de l’AH à rajouter au compte des effets bénéfiques cliniques connus et publiés de cette substance mais que « certains » voudraient voir très vite rangée dans le tiroir des inutilités d’autant qu’elle aurait « en plus » un potentiel d’effets secondaires sérieux et graves dont on cherche encore les preuves. Cela permet ainsi de répondre à certains épidémiologistes et biostatisticiens qui ont condamné l’AH et lui ont retiré tout effet clinique conséquent sur la base d’une méta analyse dont les conclusions sont difficiles à accepter au vu de la diversité extrême des études qu’ils ont colligé (4).
Le travail a étudié les effets d’un traitement par l’acide hyaluronique sur les taux sériques de deux marqueurs spécifiques et indiscutables de la dégradation du collagène de type II, composant du cartilage, au cours de la gonarthrose. Coll2-1 et Coll2-1 NO2 ont été dosés par l’équipe belge d’Y. Henrotin chez des patients souffrant de gonarthrose et inclus dans cette étude. Ii s’agissait de 51 sujets sélectionnés pour le caractère unilatéral de leur arthrose de genou sans autre localisation cliniquement décelable. L’arthrose était fémoro-tibiale et ou fémoro-patellaire, certaine selon les critères de Kellgren et Lawrence (K et L). Le groupe avait en moyenne 57 ans avec un IMC moyen de 26,7. La douleur à la marche ressentie allait de 30 à 90 mm sur une EVA douleur graduée de 0 à 100 et était notée à chaque visite. Les patients ont reçu trois injections à une semaine d’intervalle J1, J7 et J14, d’acide hyaluronique (Hylan GF-20) après leur inclusion à J-15 début d’une période de wash-out de 15 jours et suivie d’une période de surveillance clinique et biologique mensuelle sur 3 mois correspondant à J30, J60 et J90. A J-15, J1, J30 et J90 tous ont eu une ponction veineuse pour la mesure des marqueurs sériques sélectionnés.
Les auteurs rapportent les résultats biologiques obtenus dans cette étude qui correspondaient au critère principal de l’étude.
Les variations des marqueurs analysés et mesurés par méthode immunologique ont été étudiées dans le temps. Une recherche de facteurs prédictifs de réponse au traitement a été réalisée. 45 patients ont rempli la totalité des exigences de l’étude.
Il en ressort que Coll2-1 et Coll2-1 NO2 sont significativement plus élevés dans le groupe des patients ayant une arthrose sévère correspondant aux stades III et IV de K et L comparé au groupe d’arthrose modérée de stade I et II lors de l’inclusion. L’ensemble des patients présente une baisse du taux des marqueurs sériques de la dégradation du collagène II après la viscosupplémentation. Cet effet bénéfique est le plus prononcé dans le groupe des arthroses sévères III/IV de K et L. Le taux sérique de Coll2-1 est plus bas au départ chez les patients répondeurs que chez les non-répondeurs.
Les auteurs concluent à une diminution rapide de la dégradation du collagène de type II spécifique du cartilage après viscosupplémentation. Les taux sériques du Coll2-1 pourraient être un facteur prédictif de réponse à la viscosupplémentation dans la gonarthrose. Cette étude apporte enfin des informations complémentaires pour la validation de marqueurs précis concernant l’arthrose.
Conclusion
La preuve est faite d’un effet pharmacologique certain de l’acide hyaluronique qui n’est donc pas simplement, pour le genou, un « coussin sous les fesses » quand le banc est trop dur. Gageons que cette substance universelle dans le monde animal sans spécificité d’espèce nous apportera d’autres surprises heureuses et étonnantes lui permettant de trôner au milieu de rares substances utilisables car bénéfiques et sans effets secondaires majeurs dans l’arthrose.
3 commentaires
ALLIARD Jenny Mai a écrit:
25 mar 2013
j’ai 64 ans. Lors de mes radios du dos, puis des doigts, le médecin a dit que j’ai de l’arthrose. J’ai eu mal au dos (colonne vertébrale bas du dos) mes doigts de la main, maintenant mon genou gauche. j’ai vu sur le net que : l’acide hyaluronique peut soulager ces douleurs. J’ai peur de piqûres, est ce que je peut prendre 1 comprimé par jour de l’acide hyaluronique de la marque SOLGAR ? Merci de me répondre.
medecin42140 a écrit:
25 mar 2013
l’acide hyaluronique par voie orale n’a pas encore fait ses preuves d’action sur l’arthrose en général. Les injections dans les genoux ne sont pas douloureuses si faites par des spécialistes confirmés réalisant régulièrement ce geste. Dans ces conditions les preuves d’efficacité sont certaines. Cependant vous pouvez utiliser un acide hyaluronique par voie orale comme un complément alimentaire. C’est théoriquement sans danger à condition d’en connaitre la provenance et le mode d’extraction ou de synthèse. Cette information doit ainsi confirmer pour le complément choisi l’absence de contrindication.
Michel a écrit:
3 mai 2015
Bonjour, n’ayez surtout pas peur des piquures elles ne vous feront aucun mal,et c’est le moyen le plus efficace et rapide pour vous soulager !!